Colloque "Il était une fois l'IGM"

Ce colloque a lieu à l'Amphithéâtre de l'institut Curie, bat 110, Université Paris Sud, Orsay
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 Les 10-11 DECEMBRE 2014


L’Institut de Génétique et Microbiologie : un peu d’histoire

 

 

L’Institut de Génétique et Microbiologie (IGM) est né en 1989 de la réunion de deux laboratoires universitaires associés au CNRS, les LA86 (bât. 400) et LA136 (bât. 409), respectivement Institut de Génétique et Institut de Microbiologie.

 

L’Institut de Génétique

 

En 1963, le « Groupe des Laboratoires de Biologie Expérimentale » est créé au bâtiment 400 sous l’impulsion de deux généticiens, P. L’Héritier et G. Rizet, et d’un phytopathologiste, J. Chevaugeon. En 1966, la plupart des équipes travaillant dans ce bâtiment sont regroupées en un Laboratoire Associé au CNRS (LA86, plus tard appelé Institut de Génétique) dont la direction est confiée à G. Rizet. Les recherches du LA86 s’organisent alors autour de trois axes : la Génétique, la Cytologie et la Virologie. La thématique « Génétique et Biochimie des Rhabdovirus », issue des préoccupations de P. L’Héritier, a été animée successivement par A. Berkaloff, G. Brun et P. Vigier. Ce secteur disparait du LA86 en 1983 avec le départ d’A. Flamand à Gif, où elle devient Directeur du Laboratoire de Génétique des Virus. L’axe Cytologie est sous la responsabilité de J. André, un des pionniers de la microscopie électronique en France. Cette composante ne s’éteindra pas avec le départ de J. André qui fonde un laboratoire de Biologie Cellulaire au bât. 440 en 1972. En effet, le relai est assuré par J-C. Mounolou qui s’intéresse à la biogénèse des mitochondries chez la levure Saccharomyces cerevisiae et au cours de l’ovogénèse du Xénope ainsi qu’au génome mitochondrial de la drosophile et du lapin, dans une optique de Génétique des Populations et d’Evolution. Par ailleurs, une des élèves de G. Rizet, D. Zickler, exploite le champignon filamenteux Sordaria macrospora pour l’étude de la méiose dont elle deviendra une spécialiste de renommée internationale.

            En ce qui concerne la Génétique sensu stricto, il y avait un petit groupe, constitué de deux élèves de P. L’Héritier (J. Proust et C. Prudhommeau), qui poursuivra des travaux sur la drosophile jusqu’en 1988. Mais l’essentiel des recherches génétiques était réalisé par les équipes de G. Rizet et de ses élèves. Il s’agissait d’exploiter les propriétés des champignons filamenteux pour l’analyse de divers problèmes biologiques. Chez Podospora anserina, G. Rizet avait découvert, au début des année 50, deux phénomènes qui sont toujours à l’étude : l’incompatibilité végétative (J. Bernet, J. Bégueret et leurs élèves à Orsay puis à Bordeaux) et la sénescence (travaux de D. Marcou à Orsay, de L. Belcour et A. Sainsard-Chanet à Gif). Sur ce même système biologique, M. Picard s’intéresse alors à la fidélité de la traduction et à son impact sur la physiologie et le développement du champignon tandis que J-M. Simonet isole des mutants du développement sexué, qu’il caractérise avec D. Zickler. Par ailleurs, G. Rizet et ses élèves, en particulier J-L. Rossignol, font d’Ascobolus immersus l’un des grands modèles d’étude de la recombinaison méiotique. Sur le même organisme, G. Rizet découvrira, plus tard, les premiers phénomènes d’instabilité génétique dus à des transposons chez les champignons filamenteux. Enfin, J. Beisson (élève de G. Rizet sur Podospora) introduit un protozoaire, la Paramécie, comme modèle génétique en France. Ce système biologique, particulièrement approprié à l’étude des relations nucléo-cytoplasmiques, de la morphogénèse cellulaire et de certains phénomènes épigénétiques, quittera le LA86 en 1973, avec le départ de J. Beisson à Gif.

            En 1974, P. Vigier prend la direction du LA86 et l’assurera jusqu’en 1986. C’est sous son mandat, que le Laboratoire amorce une évolution vers la Génétique Moléculaire. Dans un premier temps, il faut pouvoir transformer les organismes étudiés, comme c’est déjà le cas pour la levure S. cerevisiae (1978) et deux champignons filamenteux non étudiés en France, Neurospora crassa (1979) et Aspergillus nidulans (1983). Encore faut-il adapter les protocoles à chacun des systèmes utilisés au Laboratoire car chaque champignon est un cas particulier. C’est chose faite en 1985 pour Podospora, en 1988 pour Ascobolus et en 1989 pour Sordaria. Ce virage vers la Génétique Moléculaire est associé à l’arrivée de plusieurs personnalités extérieures. Michel Guérineau (1981) et Michel Jacquet (1984) sont levuristes. M. Jacquet s’intéresse, en particulier, au rôle de l’AMP cyclique dans le cycle de division cellulaire. Il diversifiera par la suite ses centres d’intérêt, toujours dans une optique de signalisation cellulaire avec (par exemple) des études portant sur la réponse aux stress. Tout en poursuivant des travaux sur S. cerevisiae, M. Guérineau introduit un nouveau système biologique avec les Streptomyces, bactéries filamenteuses, qui présentent des phénomènes originaux de régulation et de différenciation et qui sont productrices de nombreux antibiotiques ; il s’agit, entre autres, d’analyser les voies de biosynthèse et de découvrir les mécanismes permettant à ces bactéries de résister aux antibiotiques qu’elles produisent. Par ailleurs, en 1982, Y. Brygoo rejoint l’équipe de M. Picard où il implante une nouvelle thématique sur le développement sexué chez Podospora. En 1986, Godeleine Faugeron apporte ses compétences de biologiste moléculaire au groupe de J-L. Rossignol. L’analyse de la transformation chez Ascobolus conduit à la découverte du MIP (Méthylation Induite Pré-méiotiquement) qui se révèlera l’une des facettes des mécanismes utilisés par les eucaryotes pour assurer une sorte de « contrôle-qualité » de leur génome en inactivant des séquences qui se trouvent en sur-nombre ou qui sont artificiellement sur-exprimées. Lors du départ à la retraite de J. Chevaugeon (1986), Y. Brygoo prend la responsabilité de l’équipe de Cryptogamie qui s’intègre alors au LA86. En 1989, la transformation est effective pour cinq champignons phytopathogènes ce qui permettra l’émergence de travaux originaux sur les transposons. Pour compléter ce panorama de l’Institut de Génétique, il faut signaler l’individualisation de l’équipe de M. Bolotin-Fukuhara (1985), qui développait précédemment ses travaux dans le groupe de J-C. Mounolou, travaux portant essentiellement sur la biogénèse des mitochondries chez S. cerevisiae avec des approches génétiques et moléculaires. Depuis 1986, l’Institut de Génétique était sous la direction de J-C. Mounolou, qui sera le moteur de la création de l’IGM.

 

L’Institut de Microbiologie

Ce Laboratoire a été fondé en 1968 par P. Schaeffer.

L’Institut de Microbiologie a été créé en 1968, lors de l’euphorie de la recherche scientifique qui a marqué le dernier plan avant le « crash » de 1973, qui lui a permis, avec d’autres de bénéficier d’un financement satisfaisant. Il a été créé par Pierre Schaeffer, à partir d’un noyau de pasteuriens avec Herbert Marcovich et Jean-Claude Patte qui ont migré, avec lui, pour créer une amorce de microbiologie au voisinage du bâtiment 400 consacré plus particulièrement à la génétique. Un virologiste déjà installé depuis peu à Orsay à l’Institut de Génétique, André Berkaloff, s’est joint à eux.

La régulation de la réplication des chromosomes bactériens a constitué un des thèmes forts de l’Institut de Microbiologie. Herbert Marcovitch s’intéressait à la réplication du chromosome bactérien, chez Escherichia coli. Le groupe de Jean Legault Demare, qui s’est joint un peu plus tard à partir de l’Institut du Radium, s’intéressait à celle du bactériophage T7 et Simone Séror à celle de Bacillus subtilis.

Les travaux de H.Marcovitch ont été poursuivis par Françoise Espardelier.

Pierre Schaeffer, était un spécialiste renommé de la sporulation de Bacillus subtilis, ce qui a permis à de grands noms du domaine comme AL. Sonnenshein, R. Losick (et bien d‘autres) de passer des années sabbatiques à l’Institut. Luisa Hirschbein a complété cette approche avec l’étude de la mise en sommeil de génomes supplémentaires (rassemblés par des fusions de protoplastes) devenus, ainsi, cryptiques chez Bacillus subtilis, grâce à des régulations épigénétiques. Ceci l’avait amenée à analyser la structure du nucléoïde de B. subtilis pour rechercher les mécanismes d’extinction de l’expression.

Jean-Claude Patte s’intéressait à la régulation de la synthèse de la lysine qui n’est pas assurée grâce à un opéron mais à des gènes dispersés dans le génome. Dans son groupe B. Cami s’est intéressée à la même voie, ainsi qu’à celle de la thréonine chez Pseudomonas aeruginosa. Au départ de JC. Patte à Marseille, Patrick Stragier a continué à s’intéresser à ce thème, tout en développant des recherches sur les gènes de Bacillus subtilis impliqués et a poursuivi ces recherches à l’Institut de Biologie Physicochimique à Paris.

L’arrivée de Claudio Scazzocchio est venue renforcer le pôle des champignons filamenteux, avec ses travaux sur Aspergillus nidulans, auquel s’est joint le groupe de Béatrice Felenbok. Il s’est intéressé à la conformation de la chromatine du champignon ainsi qu’au métabolisme des acides aminés, notamment de la proline, tandis que B. Felenbok s’intéressait à la régulation fine de l’expression génique.

Une équipe ayant abordé avant les autres le domaine des archées est celle de Patrick Forterre qui est venu de Villejuif et a développé, à l’Institut de Microbiologie, notamment en liaison avec l’IFREMER (dont plusieurs membres ont séjourné à l’Institut), l’étude des archées. Ce qui a été reconnu par l’Institut Pasteur, où il a été récemment recruté.

Entre temps l’Institut a temporairement hébergé deux équipes qui y ont trouvé le support microbiologique de deux types de recherches dans le domaine de la transformation et du clonage de gènes, pour la thérapie génique du système nerveux dans le cas de Jacques Mallet, et des plantes avec Jacques Tempé. Jacques Tempé a ensuite participé à la création de l’Institut des Sciences Végétales à Gif pendant que J. Mallet développait avec succès ses travaux à Gif, puis à la Pitié Salpêtrière.

L’Institut de Génétique et Microbiologie

            Lors de sa constitution, l’IGM est composé de 13 équipes. Le corps central des recherches concerne la structure et la dynamique des génomes, la réplication et la recombinaison, l’expression des gènes et les mécanismes de régulation, les proteines membranaires et les processus de transport, le cycle cellulaire et la cellule différenciée. L’originalité de l’Institut tient beaucoup aux organismes étudiés. Outre les modèles microbiologiques classiques largement utilisés par la communauté scientifique (E. coli, B. subtilis, S. cerevisiae), l’IGM conserve la tradition du bât. 400 en ce qui concerne les champignons filamenteux. Il acquiert aussi une renommée croissante pour ses travaux sur les archae et les extrémophiles. Par ailleurs certaines équipes s’intéressent à des organismes pathogènes ou d’intérêt industriel. Mais quels que soient les systèmes biologiques et les thématiques, l’IGM est rapidement marqué par la Génomique.

            L’implantation de la Génomique a, de fait, commencé, au bât. 400, peu de temps avant la création de l’IGM. Deux équipes ont participé au séquençage du génome de la levure S. cerevisiae, dès le démarrage du projet européen : celles de M. Jacquet et de M. Bolotin-Fukuhara. Très rapidement, plusieurs équipes commencent une analyse fonctionnelle de ce génome, avec des outils et des intérêts spécifiques : bio-informatique, recombinaison, topoisomérases, réseaux de régulation. Dans le cadre de l’IGM, viendront aussi les participations au séquençage et à l’analyse des génomes de la bactérie Bacillus subtilis (S. Séror) et de plusieurs archae (P. Forterre, M. Duguet). Par ailleurs, les efforts développés par P. Silar et R. Debuchy (en concertation avec les équipes de Gif et de Bordeaux) ont permis le séquençage du génome de Podospora. La participation de l’IGM à l’IFR « Génomes : structure, fonction, évolution », dont P. Forterre est responsable, démontre à quel point la Génomique est, dans tous les esprits, devenue une approche incontournable.

            Au cours des 15 années qui ont suivi sa création, l’IGM a été successivement sous la responsabilité de J-C. Mounolou (jusqu’à sa nomination comme Directeur du Centre de Génétique Moléculaire de Gif), de J-L. Rossignol (jusqu’à sa nomination comme Directeur de l’Institut Jacques Monod à Paris), de M. Duguet (1996-2001) et de M. Jacquet. Comme toute Unité dynamique, l’IGM a su essaimer (même s’il y perdait des forces) mais aussi recruter de nouvelles équipes, confortant ainsi sa vitalité. Parmi les départs, il faut mentionner ceux de J-L. Rossignol, avec la perte du système Ascobolus, de A. Nicolas (nommé responsable d’équipe à l’Institut Curie de Paris pour l’originalité de ses travaux sur la recombinaison méiotique chez la levure), de Y. Brygoo (à l’INRA de Versailles) et de L. Hirschbein (retraite). Les travaux de cette dernière sur l’organisation et l’expression du génome de B. subtilis seront poursuivis par F. Le Hégarat, jusqu’à son propre départ en retraite. Les thématiques initiées par Y. Brygoo chez Podospora et les champignons phytopathogènes ont été maintenues dans les équipes de M. Picard et M-J. Daboussi respectivement. Parmi les arrivées, on peut citer celles de M. Duguet (Enzymologie des Acides Nucléiques), de J-P. Rousset (Génétique de la Traduction), de P. Bouloc (Réseaux de Régulation), de G. Vergnaud (Génomes, Polymorphismes et Minisatellites), de P. Silar (Contrôle Génétique de Dégénérescences Cellulaires), de S. Sommer (Mutagénèse et Radiorésistance), de M. DuBow (Génomique et Biodiversité des biofilms), de C. Vélot (Catabolisme carboné chez Aspergillus nidulans) et de H. Myllykallio (Génomique et Physiologie bactérienne). Quelques équipes se sont aussi individualisées de l’intérieur, en particulier dans le domaine de l’analyse in silico des génomes (A. Kalogeropoulos puis M. Termier ; B. Labedan ; H. Myllykallio). La diversification des thématiques dans leurs détails ne doit pas masquer une unité de fond qui reste centrée sur les génomes, leur expression et le devenir cellulaire, chez les micro-organismes, avec un souci d’approche pluridisciplinaire. Et dans cet esprit , avec une volonté de dynamisme fort, d'autres chercheurs de l'institut ce sont succédés à la direction de l'IGM : Monique Bolotin-fukuhara (2004-2009), Jean-Pierre Rousset (2009-2014) et depuis le 1er Septembre Jean-Luc Pernodet; et ont ainsi continué l'élan initié par leurs prédécesseurs dans les domaines de la génétique et de la microbiologie.